• Le Mans, une expérience spirituelle

    Comme à chaque fois qu’il est sur un circuit automobile, Patrick a rencontré la presse présente pour couvrir les 24 Heures du Mans. Parmi les medias, le journal français l’Equipe qui a publié cette interview.

    Après quatre tentatives au Mans, couronnées par une belle deuxième place en catégorie GT-Am sur une Porsche 911 RSR, l'acteur Patrick Dempsey (Grey's Anatomy) revient au Mans comme patron d'écurie. Toujours avec Porsche, avec la 911 RSR Dempsey-Proton Racing n°77. Il revisite pour nous ses années Le Mans. Entretien.

    Qui a inspiré votre relation charnelle avec le Mans. Paul Newman qui a couru ici en 1979 ou plutôt le film "Le Mans" avec Steve McQueen ?
    Dès que l'envie de faire de la compétition automobile est née chez moi, j'ai rêvé des 24 Heures du Mans. Et pourtant, je n'étais qu'un débutant ordinaire. Je faisais des petites courses avec le club Porsche de ma ville. Je pense que chaque pilote a cette envie nichée dans un coin de sa tête. Cette épreuve est riche d'une telle histoire. Tout petit déjà, je m'y étais intéressé. Je me souviens être tombé amoureux d'une Porsche 917 miniature. Je la regardais, je jouais avec. Je m'identifiais aux pilotes.

    Pourquoi la Porsche 917, plutôt qu'une Ford GT 40 ou une Ferrari 512 M, autres voitures mythiques du carrefour des années 60/70 ?
    Sans doute les couleurs. Avec le bleu ciel et orange GULF. Quand tu es petit, tu t'amouraches sur des détails. Et puis il y avait la silhouette de cette 917, quel beau Proto.

    Quand êtes-vous venu pour la première fois au Mans ?
    En 2004, comme un simple fan. J'ai été bluffé par la dimension de l'événement. C'est immense ici. Encore plus impressionnant que les 500 Miles d'Indianapolis. Et puis le bonheur de faire la route en voiture au départ de Paris. Prendre les petites routes. Traverser la campagne. Visiter le Musée du Mans. Un parfum unique.

    Et comme pilote ?
    En 2009, en GT. Quelle expérience incroyable de voir autant de gens agglutinés autour du circuit et la folie médiatique autour des 24 Heures. Au moins, j'étais peinard quand je roulais.

    Vous preniez le temps de voir la foule en pilotant ?
    Pas vraiment. Tu es trop occupé à piloter. A regarder qui va te doubler, ce qui se passe autour de toi. Sauf peut-être dans le dernier tour. Là, tu te relâches, ton cerveau normé se reconnecte. Tu profites. La longueur du circuit, la taille de l'événement. C'est irréel. Tu es tellement fatigué. Tu as survécu à la course. Tu es si heureux. Emotionnellement, tu as tout donné.

    D'autres images ?
    Une odeur. Celle des barbecues. Ton habitacle est envahi d'un coup. Ça te donne faim. C'est étrange que des moments comme ça te marquent plus que les émotions de la course. C'est si intense à vivre, que tu ne te souviens de rien ou presque. Juste des flashes dans le Esse Porsche quand tu te fais dépasser presque en silence par des LMP1 bien posées sur la piste. Ça paraît tellement facile... Ou quand tu regardes dans ton rétro et que tu vois une voiture aller taper les rails et des débris voler partout. C'est irréel oui, c'est le mot juste. Emotionnellement, ça te fait sortir de ton corps. L'espace-temps s'efface. C'est une expérience spirituelle.

    La peur ?
    Mélanger des GT avec des Protos, des pilotes chevronnés avec des amateurs, c'est unique. Bien sûr que c'est dangereux mais c'est la magie du Mans. On vient aussi pour ça. Tu dois venir ici avec humilité, les yeux grands ouverts, bien préparé. Ce n'est pas une plaisanterie. C'est du sérieux ici. Des gens se sont tués au Mans. Tu ne dois jamais l'oublier. On ne peut exclure cette dimension hors norme du Mans. Ce serait lui enlever son âme.

    A quelle place mettez-vous Le Mans dans votre panthéon émotionnel ?
    Dans mon top 3. Juste derrière le fait d'être père. Le Mans, ça a changé ma vie. Tout le monde me parle de cette course, même ceux qui ne s'intéressent pas au sport auto. Ils veulent ressentir ce que j'ai vécu ici. Le Mans, c'est une leçon de vie. Apprendre à gagner, à gérer les impondérables, à se préparer à appréhender le chemin qui mène vers le succès. J'essaie de l'appliquer à chaque situation dans ma vie de tous les jours.

    Que pèse Le Mans aux Etats-Unis ?
    Sans doute un peu moins qu'au cœur des années 60/70 parce que le sport automobile est en souffrance. Aujourd'hui, l'offre sportive est exceptionnelle. Devant ta télé, tu peux zapper sur dix chaînes et tomber sur dix évènements différents. En restant juste sur le sport auto, et hors Etats-Unis, la Formule 1 à un moment fait de l'ombre aux autres disciplines. Le Championnat du monde d'Endurance est toutefois en progrès. Le challenge technologique et l'apparition des exigences "vertes" créé une belle émulsion. Le sport auto est à un tournant.

    Quel téléspectateur êtes-vous ?
    Toutes les courses m'intéressent à compter du moment où il y a du suspense, de la bagarre. Ce qui est passionnant dans le WEC, c'est qu'il y a plusieurs catégories et donc des courses dans la course.

    Comment classez-vous Le Mans face à Indy 500 et au GP de Monaco ?
    J'ajouterais le Dakar à cette liste.

    On reste sur le circuit si vous voulez bien.
    C'est ce que j'essaie de faire quand je roule.... (il rit). Le Mans est unique parce qu'il offre à chaque individu, même un amateur, la chance de pouvoir rouler au Mans. Bien sûr qu'il faut des moyens financiers pour y parvenir. Mais comparé aux 500 Miles et surtout Monaco, c'est moins exclusif. Jusque dans les années 70, Indy avait aussi cet esprit ouvert, mais c'est désormais de l'histoire ancienne. A Monaco, au mieux, tu pourras courir en Porsche SuperCup. C'est excitant. Ou alors via les courses vintage.

    Qu'avez-vous pensé de la présence de Fernando Alonso à Indy le mois dernier ?
    C'était super. Un bon coup de pub pour Indy. On a parlé de cette course dans le monde entier. J'espère voir plus de pilotes de Formule 1 se lancer dans l'aventure dans le futur. Idem pour le WEC. C'est important que les fans puissent s'identifier à des pilotes qu'ils aiment bien. Qu'ils connaissent.

    N'est-ce pas trop frustrant de venir au Mans comme patron d'écurie et non plus comme pilote ?
    Aucune frustration. J'ai eu mon podium en terminant 2e en GT-Am en 2015 avec une Porsche 911 RSR. J'ai accompli mon rêve. Bien sûr que j'aurais aimé terminer premier, mais un podium au Mans, c'est énorme. Là, je vis d'autres émotions. J'ai une vision plus globale. Il existe un sens profond de la camaraderie dans ce sport. On est une équipe. On partage toutes les émotions, quel que soit notre poste dans le team. Je sais que je vais rester éveillé "H24" pour vivre cette course. Je rêve maintenant de gagner le Mans comme team manager.

    Où est le Trophée de votre deuxième place au Mans en 2015 ?
    Il est tout petit. (Il le montre et rit). C'est le trophée le plus cher au monde entre ce qu'il a coûté à conquérir et son poids (il rit encore). Mais j'aime le regarder. Je suis fier de l'exposer chez moi. source


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